Lettre ouverte aux salariés d’Enedis et de ses multiples sous-traitants.

Lettre ouverte aux salariés d’Enedis et de ses multiples sous-traitants, qui sillonnent villes et campagnes de l’Hexagone pour installer à marche forcée les compteurs Linky et leurs relais.*

Mesdames, Messieurs,

Vous n’êtes pas sans savoir qu’une étonnante vague de refus des compteurs Linky, dits «intelligents», traverse la France depuis plusieurs mois. Cette opposition a ceci d’étonnant qu’elle est informelle et décentralisée, qu’elle se développe hors de toute structure politique ou syndicale constituée, et en dépit de la puissante propagande de votre groupe, Enedis – en dépit, aussi, de l’absence de contre-enquête de la part des grands médias sur les enjeux du projet Linky et les moyens utilisés pour le mettre en œuvre.

Même si vous êtes du côté du manche, peut être connaissez-vous les raisons de ce refus porté par des centaines de milliers de personnes : la crainte devant l’intensification du brouillard électro­magnétique et le peu de cas que les dirigeants politiques et économiques font de la santé des gens ; l’agacement devant la suppression de milliers d’emplois dû à l’automatisation du travail de relevé des consommations ; la colère devant la perspective d’un alourdissement des factures, pour financer le remplacement de compteurs qui fonctionnent de longue date par des appareils «communicants» dont la durée de vie ne dépasserait pas dix ans ; enfin, l’écœurement à l’idée que les données recueillies sur les habitudes de vie des ménages servent à affiner le profilage marketing de la population et à mitonner des offres commerciales agressives, pour pousser chacun à renouveler complètement ses appareils électriques dans les années à venir.

Et vous, au fait, qu’en pensez-vous ? Avez-vous un avis ? Êtes-vous vraiment à l’aise quand vous pénétrez dans le jardin d’une maison en profitant que les habitants ne sont pas là et que vous procédez au remplacement du vieux compteur, même s’il est affiché dessus qu’on ne veut pas de Linky à cet endroit-là ? Êtes-vous fiers quand vous intimidez des personnes âgées, ou que vous fracturez une serrure pour installer le compteur dans un réfectoire pour enfants que les responsables du lieu veulent préserver de Linky (comme c’est arrivé à Pamiers le 16décembre dernier)? Vous vous dites qu’on ne peut pas donner satisfaction à tout le monde ? Que c’est affaire d’opinion, de croyance et que tous ces braves gens sont irrationnels, voués à être balayés par le vent du Progrès ? Vous ne trouvez pas ça intéressant que toute une partie de la population réfléchisse à ce qu’on lui impose, au cadre de vie qu’on lui fabrique ?

Vous avez sans doute déjà été confronté à des refus de particuliers de voir leur compteur remplacé.

Ces particuliers ont souvent pris la peine d’écrire à ENEDIS pour signifier leur refus, et plusieurs ont reçu des appels téléphoniques menaçants de cette société, certains interlocuteurs n’hésitant pas à déclarer que le poseur, vous donc, allait venir et passer en force. C’est aussi peut-être la raison pour laquelle vous avez été quelquefois reçu de façon agressive.

Plusieurs d’entre-vous ont dans cette circonstance adoptés une attitude correcte qui a consisté à respecter la volonté de l’usager. Vous avez pris acte du refus puis fait demi-tour. D’autres poussés en cela par leur direction et celle d’ENEDIS ont tenté et parfois réussi à passer outre et ont profité de l’absence de l’usager pour procéder au remplacement du compteur quand celui-ci est accessible sans le prévenir, certains ont même usé de menaces et impressionné des personnes, souvent des femmes seules ou des personnes âgées pour arriver à leur fin.

Rien ne peut justifier de telles attitudes, et si nous savons les pressions exercées sur vous par vos directions, vous devez aussi savoir que les actes pitoyables qui nous ont été rapporté sont pour certains répréhensibles et peuvent être portés devant un tribunal et donner lieu à condamnation.

Vous devez savoir que si cela vous arrive, votre direction vous laissera tomber et niera toute responsabilité dans vos actes, vous serez seul face au juge, car eux savent que ce qu’ils vous demandent de faire est illégal, mais refuseront toujours d’en assumer la responsabilité.

Nous vous demandons simplement d’agir en homme responsable et respectable. Votre statut de salarié ne vous oblige pas d’obéir à n’importe quel ordre de votre direction ou de vos chefs si cet ordre contrevient aux lois de notre pays et/ou à la morale.

Si de tels ordres vous sont donnés vous pouvez les dénoncer en vous adressant aux syndicats de salariés ou à des personnes de confiance. Dans tous les cas, vous n’êtes pas tenu de vous comporter comme des voyous, votre contrat et votre mission c’est remplacer les compteurs par des Linky, pas de jouer les gros bras.

Bien sûr, il se peut que vous ne soyez pas en mesure actuellement de réfléchir à tout cela et que vous fassiez ce travail par nécessité.Derrière l’obéissance aux ordres des directions, il y a souvent des loyers à payer, des crédits à rembourser, ou encore des rêves d’évasion et de voyage, une fois telle mission ou tel contrat court terminés. Réfléchir et désobéir peuvent sembler un luxe inenvisageable pour beaucoup, quand il y a cinq millions de chômeurs et un tel niveau de précarité.Mais avouez que cela donne une situation étrange : les opposants à Linky refusent entre autres l’automatisation des relevés de consommation d’électricité ; donc, ils défendent en quelque sorte vos emplois à votre place. Et vous, vous travaillez activement à leur suppression ! Vous êtes comme ces employés de la Poste qui font du zèle pour apprendre aux usagers à se servir des machines à affranchir, participant ainsi à la légitimation des futurs dégraissages dans leur entreprise, dont ils seront peut-être eux-mêmes victimes.

En réalité, il se dit que dans vos rangs, ça discute, que certains d’entre vous sont effleurés par le doute. Ces doutes, il est urgent que vous les exprimiez publiquement. Savez-vous qu’au printemps 2016, des syndicalistes de la CGT Vinci ont pris position contre la construction de l’aéroport de Notre-Dame des Landes, dont est chargée leur entreprise ? A quand un communiqué syndical du même type, chez Enedis, contre les compteurs Linky et leur monde ?

Évidemment, au-delà des mots qui importent beaucoup, le mieux serait que vous vous opposiez en actes au processus d’installation des compteurs et autres concentrateurs. Si vous pensez que la politique industrielle d’EDF et Enedis nuit à la population à différents titres, alors il est de votre devoir moral d’empêcher sa mise en œuvre. Même simplement la freiner, en traînant des pieds, en bâclant certaines tâches, pourrait contribuer à un échec du projet Linky. Car actuellement, Enedis, avec ses sous-traitants, est engagé dans une course de vitesse avec la contestation. Toutes les poses qui sont ajournées sont du temps gagné pour la circulation des informations – aussi bien la circulation des motifs de refuser les compteurs «intelligents» chez soi que celle des tuyaux pour y échapper, seul ou avec son voisinage. Si 1000 communes adoptent des délibérations anti-Linky – il y en a déjà plus de 300 –, il deviendra plus difficile pour les technocrates de nier qu’une opposition conséquente existe et de maintenir leur projet tel quel.

Ceci est donc un appel à votre conscience sociale, politique et écologique : salariés d’Enedis, « titulaires » ou sous-traitants, faites tout ce qui est en votre pouvoir pour entraver la diffusion des compteurs et leur mise en réseau, pour tenir en échec l’objectif des 35 millions de compteurs posés en 2021.Réunissez-vous, parlez de la politique de vos entreprises, de ce que vous êtes en mesure de faire pour y nuire. Vous êtes mieux placés que quiconque pour connaître les tenants et les aboutissants du projet de gérer des flux toujours croissants d’énergie par informatique. Prenez contact avec les comités d’opposants qui existent partout dans le pays et apportez-leur des éléments qui pourraient être décisifs pour leur succès.

Vous pouvez télécharger cette lettre et la donner aux poseurs que vous rencontrez ou l’afficher sur votre compteur. le téléchargement c’est ici.
 
* Cette lettre est largement inspirée (quelques paragraphes ont été ajoutés) de la lettre de Sébastien Delpech, membre du groupe Faut pas pucer (mémé dans les ordis), en lutte contre le puçage des animaux et l’informatisation du monde
correspondance : Faut pas pucer, Le Batz, 81140 St­Michel­de­Vax, ou fautpaspucer@laposte.net

4 réflexions sur « Lettre ouverte aux salariés d’Enedis et de ses multiples sous-traitants. »

  1. S”il n”était question que des frais de relève, Enedis aurait pu remplacer le million de compteurs qui lâchent chaque année, (selon ses dires) puis, une fois tous les compteurs changés, supprimer la relève. Donc au bout de 60 ans au moins ! Là, il dépense plus de 7 milliards d”euros juste pour cela ? Non, il y a bien d”autres arguments bien plus alléchants. Ne crains rien. Pour le moment, aucun frais supplémentaires, aucune taxe, n”est prévue si tu refuses le Linky. Refusons-le jusqu”à la date limite (2021) et attendons voir ce qui se passera ensuite.

  2. aujourd’hui une nouvelle sous traitance: celle des relevés de compteur qui devient payante… Une façon de sanctionner les résistants et de gagner sur tous les tableaux…. comment peut-on refuser ce surcoût quand on a refusé l’installation du nouveau compteur … quelqu’un connaît -il un moyen?

  3. Pour l’instant c’est illégal et en raison même de la directive de 2009 et celle 2012/27/UE du 25 octobre 2012 articles 10 et 11 le législateur ne modifiera pas la loi. Le code de la consommation art L 224-12 exige que les fournisseurs offre la possibilité d’autorelève qu’EDF appelait relevé confiance. La CRE de son côté précise que la composante de comptage ne dépend ni du type de compteur en place ni du mode de relève (pied, GSM ou CPL). Toute menace, intimidation, harcèlement ou chantage relève des pratiques commerciales agressives sanctionnées par les articles L 121-6 et L121-7 du code de la consommation et il ne faut pas hésiter à porter plainte pour ces motifs. Ça refroidira les poseurs et leurs patrons car au bout du compte ce sont eux et non Enedis qui auraient à répondre devant les tribunaux. Bon courage, l’important c’est de ne pas douter de notre non droit car en doutant on renforce Enédis dans ses pratiques mafieuses. Cordialement. JLG.

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